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Le salaire minimum face à la réalité socio-économique d’Haïti

Résoudre le problème de salaire minimal pour l’Etat représente vraiment un dilemme puisqu’il faudrait qu’il y ait un salaire qui satisfasse les attentes des ouvriers en même temps que  les propriétaires.

Dans le cadre d’un contrat d’emploi, le salaire est l’ensemble des rémunérations ou des prestations fournies par un employeur à chacun de ses salariés en rétribution de leurs services. Il constitue la contrepartie nécessaire de la relation de travail. Le versement du salaire ne peut être aléatoire. Le plus souvent sans une intervention particulière du pouvoir public, l’entente sur la détermination du montant du salaire à conserver n’est pas toujours facile. D’un côté l’employeur veut minimiser la masse salariale, et de l’autre côté l’employé veut maximiser le montant de son salaire. Dans la pratique, le salaire minimum instauré par le pouvoir public intervient pour régler ces potentiels conflits d’intérêt.

L’Institut de Statistiques et d’Études Économiques (Insee) définit le mot salaire comme le paiement du travail convenu entre un salarié et son employeur au titre du contrat de travail dans le secteur privé et pour les agents contractuels dans la fonction publique, ou de l’emploi pour les fonctionnaires.

Il comprend le salaire de base (ou traitement indiciaire dans la fonction publique) mais aussi les primes, la rémunération des heures supplémentaires ou complémentaires effectuées, l’épargne salariale (intéressement, participation, abondement), d’autres indemnités et rémunérations annexes (indemnité de résidence, supplément familial, etc.) et les avantages en nature.

Le salaire correspond à un « prix ». Rapporté à une unité de volume de travail qui peut être une heure (salaire horaire) ou un équivalent temps plein (salaire en EQTP), il permet de comparer des emplois ou des postes de travail de durée et de temps de travail différents.

Définition de l’expression “salaire minimum”

Le salaire minimum est défini comme «la rémunération minimale que l’employeur est tenu de payer aux salariés pour le travail effectué au cours d’une période donnée, et qui ne peut être réduite par une convention collective ou un contrat individuel.».

Le salariat Haïtien.

 Le salaire haïtien présente un aspect social crucial car l’ouvrier qui exerce son travail croit fermement à sa liberté pour son travail c’est équivalent à la liberté.  Et, c’est moyennant le salaire qu’il exprime cette liberté, également défend sa dignité et son honneur. Il a donc intérêt à ce que le salaire minimum reflète les réalités économiques que possible. Sur le plan politique, le salaire minimal est le résultat des décisions politiques en Haïti. D’une part il peut créer la satisfaction de l’entrepreneur si le salaire minimal est gardé le plus bas ou son mécontentement si celui varie à la hausse.

Depuis des temps, Haïti constate des crises récurrentes liées au salaire minimum pour les ouvriers qui ne reflète guère l’équilibre du marché du travail et les rapports entre les flux dans le circuit économique.  Des syndicats ouvriers revendiquent en tout temps une augmentation du salaire minimum car il existe des paramètres qui diminuent carrément la capacité réelle de ce dernier. Parmi eux, on peut citer la variation du  taux de change du dollar a la hausse, la rareté répétitive du carburant dont leurs incidences sont flagrantes sur l’indice de prix à la consommation(IPC), Ainsi, la valeur réelle du salaire minimum est sans aucun doute varié à la baisse s’il n’y a pas une bonne politique d’ajustements salariaux.

 
En ce qui concerne les prix à la consommation, l’inflation a terminé l’année fiscale  2021 avec des hausses en glissement et moyenne annuels de 13,1% et 15,9%, contre 
respectivement 22,9% et 25,1% l’année dernière. De son côté, le taux de change moyen  annuel sur le marché formel a affiché une tendance baissière de -18,8% avec 81,13 gourdes  pour un dollar en 2021 contre 99,9 gourdes en 2020.
 
Source: Les comptes économiques 2021 IHSI

Résoudre le problème de salaire minimal pour l’Etat représente vraiment un dilemme puisqu’il faudrait qu’il y ait un salaire qui satisfasse les attentes des ouvriers en même temps que  les propriétaires.

Comprendre l’évolution du salaire minimum en Haïti 

Le salaire minimum pris dans le contexte haïtien a fait son apparition dans la législation Haïtienne le 10 aout 1934 et a s’était fixé à une gourde cinquante. Il est important de souligner qu’avant l’intronisation de mesures contraignantes de cette dite loi, le salaire  était fixé exclusivement par les employeurs.

De 1934 à 2022, le salaire minimum s’est revu à la hausse plus de quinze fois (15). Mais on constate que c’est à partir de 1984 que son augmentation a été la plus remarquable, soit près de 4 fois plus en raison de la perte du pouvoir d’achat des acteurs. Dès lors, l’initiative de relever les salaires se fait soit par les législateurs, le gouvernement ou sous pression des travailleurs eux même qui exigent de revoir à la hausse le salaire minimum.  

Soit ce tableau récapitulatif de l’évolution du salaire minimum en Haïti de 1934 à 2019 
Tableau recapitulatif

On a souvent tendance à assimiler salaire minimum aux travailleurs de sous-traitance, alors que cette dernière fait partie de l’un des segments frappés par la législation du travail. 

Le segment A concerne  

  1. Production privée d’électricité. 
  2. Institutions financières (banques, maisons de transfert, sociétés d’assurance). 
  3. Télécommunications. 
  4. Commerce import-export. 
  5. Supermarchés. 
  6. Bijouteries. 
  7. Galeries d’art. 
  8. Magasins de meubles, de mobiliers de bureaux et d’appareils électroménagers. 
  9. Magasins de matériels informatiques. 
  10. Entreprises de location de voitures. 
  11. Entreprises de transport aérien. 
  12. Entreprises de courrier, de transport de colis et de cargo. 
  13. Entreprises de jeux de hasard (tenanciers de borlette, loterie, casino, etc…).  
  14. Concessionnaires d’automobiles. 
  15. Communication, Agence publicitaire et Presse (écrite, électronique, parlée, et télévisée), sauf Presse communautaire. 
  16. Institutions scolaires privées. 
  17. Institutions universitaires privées. 
  18. Institutions de santé privées, cabinet de médecin, polyclinique. 
  19. Pompes funèbres. 
  20. Agences maritimes et aéroportuaires. 
  21. Cabinets de professionnels libéraux et de consultants. 
  22. Agences de voyage. 
  23. hôtel avec 4 hibiscus et plus 
  24. Agences immobilières. 

En ce qui concerne le segment B on retrouve les entreprises ci-dessus 

  1. Bâtiments et Travaux Publics (BTP). 
  2. Entreprises de location de camions et d’engins lourds. 
  3. Entreprises de location de matériaux de construction. 
  4. Entreprises de transport de matériaux de construction. 
  5. Quincailleries. 
  6. Autres Institutions financières (coopératives / caisses populaires, institutions de micro crédit). 
  7. Commerce de gros. 
  8. Magasins de produits cosmétiques et de vêtements. 
  9. Commerce de livraison d’eau en vrac. 
  10. Entreprises de transport terrestre. 
  11. Imprimerie, photocopie, infographie, lithographie et services informatiques. 
  12. Salons de coiffure et de massage. 
  13. Entreprises de nettoyage de vêtements (Laundry and dry cleaning).  
  14. hôtels avec 3 hibiscus et moins 
  15. Industries extractives (mines et carrières) ;  
  16. entreprises transport maritimes  
  17. Industries manufacturières tournées vers le marché local, industrie de d’embouteillage de boissons gazeuses, de jus, d’eau traitée et de brasserie.   Le segment C concerne les personnes travaillant dans  
  18. Hôtels et restaurants. 
  19. Agriculture, sylviculture, élevage et pêche. 
  20. Industries de transformation de produits agricoles. 
  21. Commerce de détail, sauf supermarchés, bijouteries, magasins de produits cosmétiques et de vêtements. 
  22. Boutiques d’artisanat et maroquineries. 
  23. Entreprises de transport maritime. 
  24. Presse communautaire. 
  25. Autres services non marchands (organisations à but non lucratif, telles des ONG  nationales et internationales, des fondations, des associations, des coopératives de   Production et de services non financiers). 

Le segment F concerne 

  1. industrie d’assemblage tournés exclusivement vers la réexportation  
  2. industries manufacturières tournées vers l’exportation. 

Le segment G concerne :  

  1. agence de sécurité privée. 
  2. entreprises de distribution pétrolière 

Le segment H concerne  

  1. Ecole professionnelle privées 
  2. institutions de santé employant plus de 10 personnes et qui offrent des services

d’hospitalisation 

Le conseil supérieur des salaires CSS 

Le code de travail a créé le conseil supérieur des salaires ayant pour mission d’analyser, de réviser le salaire minimum et faire des recommandations aux ministères du travail si besoin est. Il a été initialement constitué de 6 membres, avant d’être modifié par la loi du 10 septembre 2009 qui stipule que le CSS dit être constitué de 9 membres dont trois (3) représentants du ministère des affaires sociales, trois (3) membres du secteur patronal et trois (3) représentants pour le secteur des ouvriers. 

Trois mois avant la fin de l’exercice fiscal, ces 9 membres doivent se réunis pour étudier les variables macroéconomiques pouvant influencer le choix des acteurs dont le niveau de vie (inflation, croissance économiques, le niveau de change etc…) en se basant sur ces indicateurs. Le CSS a le droit de  suggérer au ministère des affaires sociales et du travail (MAST) d’augmenter de façon proportionnelle les salaires afin que les ouvriers restent sur la même courbe de consommation.

Le salaire minimum de référence pour les entreprises faisant partie du segment A est fixé à

Une fois ces recommandations soumises au MAST, ce dernier peut l’approuver ou la rejeter. En cas d’approbation, un conseil de ministre sera organisé  afin de le rendre effectif sous forme arrêté.  

Il est  interdit au conseil supérieur des salaires de proposer au gouvernement de baisser les salaires. Toutefois,  l’obligation est faite aux employeurs de bien vouloir respecter les diapositives légales, sinon le tribunal spécial du travail peut prendre des sanctions allant de 1 000 gourdes à 3 000 gourdes par infraction. Ils peuvent également être contraints à réparer les dommages causés aux employés par les versements des dommages- intérêts. 

Comment est déterminé le salaire minimum ?

SEPT CENT SOIXANTE DIX ET 00/100 Gourdes (770.00 HTG),

Le salaire minimum est déterminé par les autorités étatiques moyennant la loi sur la fixation du salaire minimum. Ci-dessous sont les salaires minima de référence en fonction du segment des activités économiques. 

Le salaire minimum de référence pour les entreprises faisant parties du segment B est fixé à

SIX CENT QUINZE et 00/100 Gourdes (615.00 HTG), par journée de huit (8) heures de travail :

Le salaire minimum de référence pour les entreprises faisant partie du segment C est fixé à

CINQ CENT QUARANTE ET 00/100 GOURDES (540.00 HTG), par journée de huit (8) heures de travail.

Le salaire minimum de référence pour les personnels faisant partie du Segment E est fixé à TROIS CENT CINQUANTE et 00/100 Gourdes (350.00 HTG) par journée de huit (8) heures de travail

Le salaire minimum de référence pour les établissements faisant parties du segment F est fixé à

SIX CENT QUINZE 00/100 Gourdes (615.00), par journée de huit (8) heures de travail

Le salaire minimum de référence pour les entreprises faisant partie du segment est fixé à SIX

CENT QUINZE 00/100 Gourdes (615.00 HTG), par journée de huit (8) heures de travail

Le salaire minimum de référence pour les entreprises faisant partie du segment H est fixé à SIX CENT QUINZE 00/100 Gourdes (615.00 HTG), par journée de huit (8) heures de travail.

  • Un texte de Richelor POLYNICE
  • Lens AUGUSTIN
  • Phallens PRINCE

1 thought on “Le salaire minimum face à la réalité socio-économique d’Haïti”

  1. Salut! Je vous remercie pour l’article. Je tenais par ailleurs à vous encourager pour votre initiative très intéressante. J’espère que cela continuera et se fera réellement dans l’intérêt du pays.

    En ce qui a trait à cet article, Je ne pense pas pour ma part que la question du salaire minimum soit un dilemme pour l’État. Il faut garder à l’esprit que l’État ne joue pas effectivement un rôle d’arbitre et qu’il est même partie prenante dans l’affaire, dans la mesure où les autorités et cadres étatiques ont leurs intérêts en jeu, et qu’ils défendent ceux de leurs patrons dans la bourgeoisie et des multinationales. En d’autres termes, ils seront toujours dans l’impossibilité de donner gain de cause aux travailleurs.

    Cette tendance à minorer le salaire minimum s’inscrit dans un registre plus large d’exploitation des masses laborieuses et de domination étrangère séculaire, avec l’État haïtien comme complice. Donc le problème n’est pas à chercher dans les conjonctures économiques, mais plutôt dans la structure économique et sociale héritée depuis l’époque coloniale en passant par l’occupation américaine. Et de ce fait, sur le long terme, il ne peut avoir de solutions purement économiques, car le problème est sous-tendu par un affrontement idéologique latent, qui doit être nécessairement résolu par un changement de paradigme lequel impliquera des luttes féroces, longues, profondes,etc.

    Le problème du salaire minimum étant lié à un système global, ce n’est pas par de simples revendications à caractère économique qu’on inversera l’ordre des choses. Toutefois, les études économiques, comme vous le faites, se révèleront d’une importance capitale pour appréhender l’aspect technique de la situation.

    Je vous félicite et remercie encore une fois tout en espérant que mon commentaire vous sera utile.

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